Sidonie, alias SKM, est une fille du Sud née à l’est. Une fille du Sud car tout son travail le dit, gorgé qu’il est de soleil, de rêve et de douceur de vivre. Les couleurs déjà, et les matières aussi, car née de deux parents issus de la grande famille du prêt-à-porter, elle a très vite appris les tissus, la douceur du coton, les reliefs du velours, le moelleux du cachemire, le virevoltant des jupes d’été. Bon sang ne saurait mentir, elle intègre la célèbre école de mode, ESMOD, mais ne choisit ni le stylisme, ni le modélisme, elle opte pour le travail des matières : travailler les tissus, assembler les tissus, créer son propre tissu, elle se régale. Elle le dit d’ailleurs en un rire : « Je touche tout le temps ! »

Puis c’est la rencontre avec un atelier de céramique, le plaisir du toucher exalté, la joie de déjeuner avec ses amis dans ses propres assiettes, mais plus encore d’ouvrir un espace à elle. Puis arrive la Covid, le confinement et la fermeture de l’atelier. Et là, c’est la révélation. Sa frustration lui donne une immédiate direction, poser des mots qui lui sont chers – P’tit bonheur, Ange, Amour, Vie – sur des matières qui le lui sont tout autant, bouts de tissus chargés d’amour comme le pyjama de son fils, le filet de ses précieuses gousses d’ail dont elle relève ses plats de pâtes, ou les emballages cartonnés des plaques de chocolat Nestlé avec lesquelles elle confectionne un gâteau iconique, moelleux à souhait.
Tout ce qu’elle a à portée de main s’impose dans ses premières toiles, ses mots se frottent à ceux des autres, parfois des citations comme celle de Camus « Créer, c’est vivre deux fois », celle de Colette « Faites des bêtises mais faites-les avec enthousiasme » connue (en dehors de ses livres) pour ses recettes bourrées d’ail ou encore celle de Charles Schulz, père de son fameux Snoopy : « Le bonheur, c’est se réveiller et regarder. » C’est exactement ce qu’elle fait au premier étage de son atelier, bourré de couleurs, de tissus et matériaux en tous genres, de livres d’art et de fleurs, baigné de soleil et de cette En-Vie qui la caractérise. Instinctive mais impatiente, l’inspiration doit venir d’un seul coup et s’imposer en quelques jours dans une sorte de frénésie douce qui dit ce qu’elle a à dire. Aujourd’hui, Sidonie est passée de ce qui était un « passe-temps » à ce qui est devenu une nécessité. C’est la naissance d’une artiste. Une artiste au langage universel, une artiste à la main chercheuse, capable de tout assembler, tout transformer, dire en quelques mots ce que chacun ressent, parler de la beauté du monde, comme de sa laideur, celle de la société de consommation, qui fabrique et pollue notre belle terre-mère, que cette fille aux pieds nus dans la rosée du matin chérit depuis son petit coin du sud. Une « Êtoile est née », dit-elle dans l’une de ses dernières créations. Et si c’était elle ?